Le 23 février 2021, la commission des finances du Sénat recevait une énième proposition de loi visant à « orienter l’épargne des Français » . Or, c’est loin d’être le premier texte de ce genre et ce ne sera surement pas le dernier, tant il est vrai que nos politiques semblent particulièrement intéressés par le fléchage de nos économies depuis quelques années. Indépendamment du sujet traité par la dernière proposition de loi en date, on peut être tenté de voir dans le libellé même de ce texte un reflet de la profonde méconnaissance des Français en matière de culture économique. Car en effet, de qui aurait-on besoin « d’orienter » ainsi l’épargne sinon de gens qui ne seraient pas capables de s’en occuper eux-mêmes ?

Mais d’où vient cette apparente nécessité de dire aux Français comment mettre de l’argent de côté ?

 

 

Les Français et les finances : un constat d’ignorance

On pourrait trouver cette conclusion un peu hâtive, et ce serait également faire un mauvais procès aux rédacteurs de cette proposition de loi de supposer que leur but premier n’est pas d’améliorer le financement des secteurs visés. Néanmoins, s’il est un constat qu’on peut facilement mettre en évidence, c’est bien celui de l’illettrisme financier des Français. Ou en tout cas, du profond manque de repères dont ils souffrent au quotidien sur le sujet, et qu’ils reconnaissent eux-mêmes bien volontiers.

Ainsi, la Banque de France a publié fin 2020 sa troisième enquête sur l’éducation financière du public en France, et il en ressort que seules 20% des personnes interrogées considèrent avoir une bonne connaissance sur les questions financières. Une proportion qui n’est pas uniquement de l’ordre de la perception puisque les résultats des différents quizz auxquels les répondants ont été exposés montrent un score de connaissance à peine au-dessus de 5/10, en baisse par rapport aux années précédentes.

 

Source : « Enquête sur l’éducation financière du public en France » de Audirep pour la Banque de France

Et ce manque de savoir économique se retrouve directement dans la manière dont ils allouent leurs différentes enveloppes d’épargne. 

Une épargne de précaution des plus traditionnelles

Les Français ont toujours été un peuple d’épargnants, et la crise liée à l’épidémie de Covid-19 n’a fait que renforcer cette prédisposition. Pour autant, les deux tiers du patrimoine financier de nos concitoyens reste cantonné à trois produits : l’assurance-vie, le Livret A… et le compte chèque ! Des supports particulièrement peu rémunérateurs (voire pas du tout pour les comptes de dépôt) mais qui répondent à la principale préoccupation des épargnants, la sécurité.

Car en France, on n’épargne pas pour gagner de l’argent, et encore moins pour spéculer, mais d’abord et avant tout pour se protéger des coups durs, a fortiori durant des périodes de crise où l’emploi est menacé. C’est dans notre culture économique. C’est aussi une façon d’anticiper d’éventuelles dépenses imprévues, de se constituer un capital en vue d’un projet d’investissement, ou encore de préparer sa retraite. Autant de raisons qui excluent le risque de perte en capital, et peu importe si le rendement n’est pas au rendez-vous, du moment que l’argent épargné ne donne pas l’impression de fondre comme neige au soleil.

Et ne pensez pas les faire changer d’avis en leur expliquant que le faible taux d’intérêt du Livret A par exemple, ou pire, l’absence d’intérêt du compte de dépôt, ne suffit pas à compenser l’érosion naturelle liée à l’inflation, ils resteront sur leurs positions. Car les Français ne sont pas réputés pour leur culture économique, et la plupart d’entre eux ont tendance à raisonner en euros constants. Pour l’assurance-vie, et surtout pour le Livret A, c’est la même chose. Leur énorme popularité en France est d’abord due à la promesse de capital garanti et disponible à tout moment : l’argent placé reste totalement liquide. À ce titre, les épargnants utilisent bien souvent ces supports de la même manière que leurs parents ou leurs grands-parents, à savoir comme des réserves de précaution qu’ils alimentent au gré de leurs possibilités et dans lesquelles ils peuvent parfois piocher pour faire face à des dépenses imprévues.

Sauf que ce comportement de bon père de famille est désormais un casse-tête pour les institutions qui ne savent plus comment relancer la machine économique.

 

Un manque de culture économique qui pèse désormais sur la croissance

Pendant longtemps, cette ignorance populaire était plus ou moins entretenue par certaines élites qui souhaitaient conserver la mainmise sur les mécanismes capitalistiques. Une forme d’exclusivité qui avait pour conséquence d’accroître encore davantage les inégalités.

Sauf qu’au cours de ces trente dernières années, ce sont d’autres crises qui ont bouleversé l’ordre établi, des crises à la fois plus profondes et plus étendues, qui n’ont épargné aucune couche de la société et qui ont remis à plat la plupart des modèles sociaux, économique et même politiques auxquels la France était habituée. Et si le désintérêt culturel des Français pour la chose financière perdure encore aujourd’hui, il est devenu un véritable handicap économique pour la nation, un frein à la croissance dont on a bien compris qu’elle ne peut désormais passer que par l’implication de tous les agents économiques.

Aujourd’hui, pour l’État comme pour les marchés, il est donc devenu urgent que tous les Français contribuent à l’effort d’investissement et de soutien de l’économie. Mais pour cela, à défaut de pouvoir les aider à acquérir les connaissances qui leur manquent, les institutions multiplient les initiatives visant à inciter les épargnants à s’intéresser à d’autres supports que le Livret A ou l’assurance-vie. Ainsi, alors qu’il y a 20 ans, on disait de la bourse qu’elle était risquée pour les épargnants, qu’il s’agissait le plus souvent d’une sorte de « loterie financière » (Newsweek, 5 juillet 1999) où pour quelques gagnants il y avait énormément de perdants (ce qui n’est pas faux, au demeurant), on tente aujourd’hui de convaincre chaque Français que rien n’est plus sûr à long terme que les marchés financiers. 

L’État multiplie les initiatives, au risque de brouiller encore davantage les Français

De son côté, le ministère de l’économie a décidé que les Français s’étaient suffisamment reposés sur leur bas de laine et qu’il allait falloir les pousser désormais à dépenser l’énorme épargne accumulée pendant la crise. Dans le discours officiel, il s’agit plutôt d’un dispositif d’incitation avec à la clé de nouveaux privilèges fiscaux pour ceux qui suivront les recommandations de Bercy. Mais dans les faits, l’exécutif est sur les dents car, comme le dit Bruno Le Maire, le ministre de l’Economie, des Finances et de la Relance, « nous serons jugés à la fin de l’année sur le retour de la croissance, qui doit être la plus forte possible. »

Alors on va de nouveau distribuer des passe-droits fiscaux, ménager des niches, proposer des plans de transferts intergénérationnels, créer de nouvelles exceptions qui vont encore faire grossir l’indigeste code des Impôts, dans le seul but de drainer un maximum d’argent des épargnants. Un ensemble de mesures qui vont surtout venir contribuer à brouiller encore davantage la perception des Français en matière financière. Il y a aussi le président de la commission des finances à l’Assemblée, Éric Woerth, qui propose de créer un Livret C (oui, après le A et le B, pourquoi pas un C comme… coronavirus), dont les fonds iraient aux TPE et PME, le Conseil économique social et environnemental qui veut favoriser l’économie verte pour « améliorer les perspectives d’avenir de la France« , le Haut Conseil pour le Climat qui souhaite qu’on libère l’investissement dans la rénovation écologique des logements. Et puis, il y a tout une partie de la Gauche française qui demande plus simplement qu’on taxe l’épargne accumulée par ces odieux citoyens qui se sont engraissés pendant la crise.

 

Les Français veulent surtout plus de réponses concrètes

Pendant ce temps-là, alors que la manne constituée par l’épargne des Français aiguise les appétits de toute sorte, on oublie une fois de plus de prendre en compte les motivations des gens qui ont mis cet argent de côté. On néglige leurs attentes, on nie leurs craintes et on occulte complètement la profonde perte de confiance que peut traduire un tel repli des agents économiques.

Pourtant, les Français ne sont pas dupes, ils savent que leur argent n’est pas destiné à rester inactif sur leurs livrets ou même leurs comptes de dépôts. Ils comprennent qu’il faut investir, consommer de manière durable, faire repartir l’économie, mais ils attendent qu’on leur donne des réponses concrètes, accessibles, cohérentes. Ils ne sont plus du tout intéressés par les « dispositifs » bricolés à la va-vite pour venir s’ajouter à la pile d’autres dispositifs aussi mal fagotés et qui émergent au gré des crises que les pouvoirs publics peinent à endiguer, à défaut de les comprendre. Ils veulent qu’on leur propose de vraies alternatives crédibles, surtout en période de taux nuls et de déflation, des offres simples à comprendre, des solutions d’épargne de conviction. VeraCash peut être l’une de ces offres, qui répond à la fois au souci de sécurité des épargnants et à la préservation de leur pouvoir d’achat, tout en assurant une liquidité totale.

Enfin, les Français savent aussi qu’il leur manque des connaissances de base en matière de culture économique. Comme le rappelle la dernière enquête de la Banque de France, ils sont 84% à penser que l’éducation financière et budgétaire devrait être enseignée à l’école, et en dépit de leur méconnaissance, ils sont plus de la moitié à s’intéresser réellement à l’actualité financière. Il faudrait alors cesser d’infantiliser les Français en tentant d’orienter leur épargne au gré des besoins de l’économie, mais plutôt leur apporter toute l’information nécessaire afin qu’ils comprennent les enjeux et décident eux-mêmes de la société qu’ils veulent voir émerger. Mais pour cela, il faudrait aussi que les institutions cessent de penser que les individus sont au service de l’économie, alors que c’est à l’économie de s’adapter aux besoins des individus, en commençant par leur culture économique.

 

Source : « Enquête sur l’éducation financière du public en France » de Audirep pour la Banque de France